Ce qui me fascine, c'est que ce mot-là ne rappelle rien. Nul autre ne vient l'éclairer. Objet unique, solitude et pureté magiques, éclat sombre au fond d'une espèce de nadir verbal.
J'ai écrit ça dans le Verbier. Autant dire que cela n'ôte quasiment rien au mystère. Voilà un mot magique, une formule magique à lui seul, en ce sens que d'une part, selon moi, sa musique est parfaitement accordée à ce qu'il veut dire, et que d'autre part je comprends mal pourquoi. TALISMAN reste pour moi un mot secret. Comment analyser, par exemple, ce parfum oriental qui flotte autour de lui ? La rime avec «birman» ou «ottoman» ? Il y a sûrement derrière lui d'autres mots cachés dont je ne saisis, malgré mes efforts, que les ombres. En tendant l'oreille plus encore, j'entends un début plutôt sonore, coloré d'une certaine assurance, d'une confiance dans on ne sait quel pouvoir ; puis le frottement léger de deux consonnes, pour moi voluptueux, le même qui rend si beaux, si forts l'enthousiasme ou l'orgasme, mais en bien plus discret ; la finale étouffée nous le confirme à mi-voix : un talisman est quelque chose d'intime, de recueilli, de profond ; moins un objet qu'une pensée, douce comme un baume.