POÈTE EN PROSE


Il est question des différents bruits de la ville, rangés dans deux catégories : les agressifs et le sournois.

«Tantôt potin qui vrille les tympans

tantôt ronron qui s'insinue comme cérumen»

Pour mieux nous faire entendre leur différence, l'auteur a travaillé d'abord les sonorités : dans le premier cas, brutales (la stridence de «vrille») et percussives ([p] et [t] répétés, le «pan» final) ; dans le second, grondement puis sifflement légers, finale assourdie. Mais le rythme n'est pas en reste. Le potin est rendu par un 4+5 boiteux, dissonant, alors que le ronron sourd et monotone s'étale en trois vagues régulières, 4+4+4, formant alexandrin.

Voilà un poète qui sait où il va ! Sauf qu'il n'est pas poète. Il s'appelle Benoît Hopquin, il écrit en prose. La phrase originale, sans alinéa, est ponctuée classiquement d'une virgule après «tympans» et d'un point après «cérumen». Elle ne se trouve pas dans un livre, mais dans Le Monde.

Poésie et prose, même combat. CQFD.



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