UNE PETITE OUVRIÈRE


1

Commencement de voyage


La mère de Denise est très pauvre. Elle est obligée d'appeler son frère à son aide. Son frère lui conseille de mettre Denise à Paris dans une grande école. Denise avait sept ans et ne savait ce que c'était, Paris. C'était quand même excusable car elle habitait à Tango-Tongo. Tango-Tongo c'était un tout petit village d'Australie. C'était à 3 879 kilomètres de la capitale. Donc, Denise prit son savon et sa brosse à dents et fila. Fila ? Oui. C'était pourtant vrai, elle n'était plus là. Comment expliquer ça ? Elle ne voulait pas aller dans une grande école. Et pourquoi ne pas aller à l'école ? Voilà le problème. Elle avait peur. Elle fit 11 km le premier jour, et elle aurait pu faire 20 km mais elle avait la flemme. Pendant un mois elle marcha vigoureusement. Mais après elle se lassa, elle n'avait fait que 246 km. Mais elle avait subsisté grâce à sa tente de camping. Et qu'est-ce qu'elle mangeait ? Tout ce qu'elle trouvait. Des poissons dans les rivières, des fruits aux arbres, des légumes dans la terre etc. etc. Donc Denise n'était pas très sûre que la chance était pour elle. Donc pendant trois mois elle tenut fermement. Elle avait fait 991 km. Elle était contente. Puis un beau jour vers cinq heures de I'après-midi, elle se dit : De toute façon, la mer est devant moi. Je ne pourrai pas la traverser. Mais elle ne retrouva plus son chemin et se perdit. Elle sentit peu à peu la brise de la mer et continua tout droit. Si bien qu'en huit jours, elle arriva à la mer. Pendant trois jours elle erra dans une ville qu'à la fin une dame riche la recueillit. Elle lui dit qu'elle partait pour I'Asie. Alors la petite Denise raconta son histoire à la dame riche. Denise voulait aller en France pour travailler dans une usine de chicorée.



2

La traversée


La traversée fut bonne. Denise se promenait avec beaucoup d'aisance et se faisait un plaisir de répondre aux questions que quelques voyageurs lui demandaient, voyant que cette fille n'était pas dans son état naturel. Bref ! Denise menait la belle vie. Mais un soir une avarie colla le bateau à sa place. Denise prit une ceinture de sauvetage, et la mit à sa ceinture en cas de naufrage. Trois jours passèrent sans que le navire poussé par la force motrice des eaux échoue sur un récif. Le bateau avait repris sa route. Le lendemain on faisait escale à Bombay où était le but du navire. Trois heures après nos deux femmes prenaient le bateau une nouvelle fois et en quinze jours elles furent en Turquie.



3

Prisonnière


Denise, arrivée en Turquie, fit de longues promenades avec son sac à dos, sa gourde, toute sa nourriture, et sa veste. Mais une fois qu'elle se promenait elle se dit : Et la France je l'oublie. Elle revint deux jours après chez la vieille dame et lui expliqua qu'elle voulait aller en France. La vieille dame ne voulut pas. Elle enferma Denise dans une chambre. Denise ne put passer par la fenêtre car il y avait des barreaux. A la faveur de la nuit, Denise prit son canif et commença à scier les barreaux de sa prison. Pendant un an Denise sciait. La nourriture lui était par un monte-charge. Denise n'avait pas oublié son proget d'évasion. Elle avait scié tous les barreaux. Elle s'échappa.



4

Libre !


Denise, aussitôt qu'elle fut libre, rafla tout ce qu'elle pouvait trouver, comme, fruits, viande, etc. etc. elle fourra tout dans son sac. La tente de camping était dans le sac. Elle prit une torche électrique qu'elle mit à sa ceinture, et un fusil qu'elle mit en bandoulière sur son épaule, et un poignard qu'elle tint dans sa main. Elle voulait aller en France la pauvre. Si elle savait qu'elle pouvait faire au moins 10 823 km à faire. Elle marcha pendant trois mois. Elle entendit parler d'un train qui allait en France. Denise savait parler le français et I'anglais. Elle trouva un billet de huit shillings dans son sac. Elle paya son billet pour la France. En huit jours elle était à Paris. Elle courut tout droit vers un bâtiment blanc. Elle demanda ce que c'était, cette grande maison. On lui dit que c'était une école. Alors elle rentra. C'était une école de chimie, et on lui indiqua sa chambre et un an plus tard ! hop ! la voilà chimiste. Elle gagne.



5

Retour en Australie


Le retour en Australie fut de courte durée. Elle prit I'avion de Paris à Darwin, et prit le train pour Tango-Tongo. Sa mère s'évanouit de joie dès qu'elle vit sa fille. Mais elle reprit son sérieux et dit à sa fille qu'elle était de plus en plus pauvre. Mais sa fille lui coupa net sa phrase et lui dit :

- Maman, je suis allée à Paris dans une école de chimie !

- Quoi! Mais comment tu as fait?

Et Denise raconta à sa mère toute son histoire du commencement à la fin.

- Mais c'est formidable, ça ! dit la mère.

- Notre pain est assuré.

- Surtout que tu gagneras beaucoup d'argent.

- Oui ! Je gagne 50 000 F par mois.

- Tant que ça !

- Et oui.

Et Denise avait grandi. Elle avait maintenant presque dix ans.

Il fallait croire qu'elle était grande.

Trois jours plus tard. La mère et la fille s'embarquaient dans un avion et partirent. La mère passa pour I'lran.



6

Avec sa mère


Une fois en avion, Denise dit à sa mère

- Ça fait la deuxième fois que je vais en avion. Mais sa mère ne dit rien.

- Maman ! Qu'as-tu ?

- Je pense à quelque chose

- À quoi ?

- Si par hasard tu serais en chômage.

À ce moment I'avion fit une tête à queue, et descendit vers la mer, moteurs coupés et franchit le mur du son avec une vitesse effroyable. Dès qu'il toucha la mer il remonta vers le ciel. Denise aperçut au loin une île. Elle s'attacha à son siège. Mais elle perdit l'équilibre dès qu'elle fut attachée à son siège. Elle tomba lourdement sur un bouton près du siège. Sans qu'elle sache ce qu'elle faisait, elle sauta en parachute. Elle tomba dans I'île. Sous le choc Denise s'évanouit. Quand elle retrouva ses sens, elle était en compagnie de la dame qui I'avait emprisonnée. La mystérieuse dame dit :

Je tiens mon ennemie!

Et elle disparut parmi les broussailles de la grande île.



7

L'île inhospitalière


Denise brisa ses liens en un effort suprême. Mais au moment où elle s'échappait, un homme arriva avec un gourdin. il assomma Denise et cria : Maîtresse ! Venez voir mon travail ! Huit nègres arrivèrent. ils tiraient un traîneau en bois, et dedans se trouve la dame mystérieuse assise sur des coussins. Elle ricana et dit : Ah, ah, je suis bien contente ! Tu vois, Jim, cette fille est mon ennemie ! Je te dis en ce moment des paroles qui ne cachent pas mon bonheur. Et elle disparut. Quand Denise se réveilla, elle était liée. Elle était dans une hutte en argile et en bois. Elle s'endormit. Vers deux heures du matin, un homme la réveilla. C'était un Européen. Il dit à Denise : Dépêchez-vous, mon avion est prêt ! Et I'homme porta Denise jusqu'à une clairière où il la déposa devant un avion. Dix nègres se battaient contre deux Français. Les deux Français étaient armés de brownings, et les sauvages de gourdins. Les huit nègres avaient trente-trois hommes de morts. Les blancs prirent leur élan et montèrent dans I'avion avec I'homme et Denise.



8

La grande explication


L'homme, après un court silence dit à Denise Comment t'appelles-tu ? Denise répondit : Denise Avermouk !

- Et où habites-tu ?

- A Tango-Tongo ! Si vous voulez que je vous explique ce que c'est Tango-Tongo, c'est un tout petit village d'Australie.

- Bon ! Je vais te dire toute I'histoire de la dame qui t'a emmenée de I'Australie à I'Asie.

Et l'homme commença !

- Quand ta mère avait dix-huit ans, elle se promenait souvent seule pendant la nuit. A ce moment de la jeunesse elle habitait à Bangkok, la capitale du Siam. Une fois elle me rencontra et dit : Quel beau jeune homme ! Et elle me prit par la main et on s'est promené pendant une heure. Mais une femme apparut et lança un couteau en direction de ta mère. Mais elle rata son coup et glissa sur la chaussée. Elle se releva et dit : Je me vengerai, sachez que je m'appelle Sarah-Marie Vloff ! Et elle disparut. Trois ans plus tard je vis cette femme prendre le bateau pour I'Australie. Huit ans plus tard, elle reprit le bateau avec une petite fille. Je prenais un avion à moi car j'ai cinq avions, et je pris deux hommes avec moi. Mon avion prenait de I'avance sur le bateau. Le bateau s'arrêta à Bombay. Puis quinze jours et le bateau était en Turquie. Puis deux ans plus tard, et Sarah-Marie Vloff partit en avion. Je savais que son père en mourant lui avait donné une île, et Sarah-Marie avait fait des soldats de son père une bande d'esclaves. Mais les esclaves ne s'étaient pas révoltés et s'étaient attachés à leur maîtresse. Cinq semaines plus tard un avion passa au-dessus de son repaire. Les cent nègres prirent des grenades, et chose curieuse, les grenades avaient agi sans bruit. Mais j'avais tout vu. Pendant la nuit, les nègres ne dorment pas souvent, c'est pourquoi tu as trouvé en venant ici tous ces nègres. Mais tu sais pourquoi Sarah-Marie t'a recueillie ? Je vais te le dire. J'étais avec elle dans la même école et je sais tout. Une fois, je me promenais dans la cour de I'école et Sarah se promenait à deux pas du pied d'une brute de l'école. Elle se cassa le nez. Trois ans plus tard elle jura de se venger. Et voilà I'histoire finie ! Mais revenons à notre dîner. Voici le dîner, bon appétit !



9

De nouveau la France !


Après avoir mangé, Denise dit :

- Quand est-ce que nous atterrirons ? Et où allons-nous atterrir ?

- Nous allons atterrir à Athènes, et nous lancerons un S.O.S. à I'avion qui t'a lâchée sur l'île.

- Et quand y serons-nous ?

- Demain matin à cinq heures !

- Bon ! C'est tout ce que je voulais savoir.

- Ah oui, j'ai oublié de vous dire que nous devrons coucher dans I'avion, car la route est longue. Surtout qu'il y a 53 259 km, et la mer Méditerranée, et une partie de l'Asie, et encore...

Denise était si joyeuse que trois jours plus tard elle ne put garder son sérieux avec sa mère qui était sortie de I'avion et avait, poussée par le vent, fait 25 km en passant par une grande crique, où une ville était construite. Elle arriva juste à temps pour entendre dire qu'une certaine Catherine Avermouk est appelée au téléphone. A Sofia, on lui téléphonait. L'avion où sa fille avait été recueillie lançait un S.O.S. disant de lancer un S.O.S. à Sofia qui téléphonerait aux alentours du drame. Ils trouvèrent enfin et envoyèrent un avion pour secourir la mère de Denise. L'avion en arrivant à I'aérodrome, avait soudain bondi en vrille et s'était écrasé au sol. La mère de Denise eut une jambe cassée, et le pilote, les côtes fracassées. Le pilote fut remis en contact avec la situation de la vie après deux mois de lutte contre la mort. Denise était venue en France, et jouissait d'un bon salaire. Une seule anomalie. Elle n'exerçait qu'un métier qui ne la réjouissait pas beaucoup. Mais à dix-huit ans Denise a quitté depuis longtemps la chimie, ne sachant presque rien elle rentra dans la classe de 6e et avec un grand miracle, réussit son bachot. Après trois ans de lutte pour le travail, elle était professeur.



10

Tout est bien qui finit bien

Conclusion


Pendant deux ans, Denise n'avait aucune maladie. Mais pendant trois mois, une maladie fit son apparition. Denise fut atteinte. Pendant un an Denise lutta contre la mort. Puis après, la maladie disparut. Denise reprit son métier, et à 23 ans, trouva un fiancé de 25 ans. Trois ans après leur rencontre ils se mariaient. Ils urent trois enfants. Comme le mari de Denise s'appelait François Clarc, les trois enfants furent nommés, Edith Clarc, Troïlus et Jean-François. Jean-François admirait les exploits de sa mère. Au premier jour de classe, sa mère le surprit dans sa chambre en train de pleurer. Elle lui demanda la cause et le bambin répondit : Tu sais, on est toujours un peu petit.


FIN


Sèvres, mars 1956


Fillette lisant
(Dessin de Anne Bozellec).

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J'avais huit ans quand j'écrivis Une petite ouvrière. Je reproduis le manuscrit tel quel, avec son orthographe et sa syntaxe inventives. La conjugaison, notamment, ne manque pas de saveur. Mes pages d'aujourd'hui, à côté, paraissent bien académiques... Voilà pourquoi, sans doute, certains de mes amis me disent que ma Petite ouvrière est le sommet définitif de mon œuvre.

Un beau souvenir : Lille, 2001, théâtre de la Découverte. Ayant carte blanche pour une séance de lectures, je choisis de commencer par un extrait de mon opus 1, la fin du chapitre VIII, sans annoncer le nom de l'auteur ni son âge. Je fais lire la chose par le doyen de la troupe, âgé de quatre-vingts ans, qui s'exécute — plein d'humour — avec un sérieux papal. Mines désorientées des spectateurs... Quant à moi, pris d'une bouffée de tendresse pour mon héroïne, la petite Denise Avermouk, je me dis qu'après tout mes chers amis n'ont pas complètement tort...

Hélas ! Une petite ouvrière n'aura été qu'un feu de paille : l'histoire que je rédigeai l'année suivante, pour l'abandonner après cent pages, est totalement nulle.


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