J'ai épluché toute la comptabilité depuis le début. En -86, Athènes a été en partie rasée par Sylla, général romain. On devrait pouvoir demander des réparations de guerre à l'Italie.
C'est ce que dit un pingouin à un autre pingouin. Ils sont grecs : on voit le Parthénon au fond.
Les volkonautes lecteurs du Monde ont reconnu l'humour de Xavier Gorce, dont les dessins squattent souvent leur journal. Un humour léger, d'une finesse toute merkélienne. Je traduis : ils se prennent pour qui, ces petits merdeux de Grecs ? Réclamer des sous à l'Allemagne, pour des dommages de guerre qui se perdent dans la nuit des temps — soixante-dix ans !
Mon premier mouvement est de ceindre d'andouilles le front auguste (au sens clown) du célèbre dessinateur. Mais non, impossible : il fut déjà couronné il y a trois ans, à la suite d'un dessin nettement plus hellénophobe que celui-ci, qui du coup paraît gentillet. On objectera que Georges Duhamel a obtenu deux fois la distinction suprême ; oui, mais Duhamel avait dans l'andouillerie un talent et une constance qui manquent un peu à notre dessinateur manchot, figure finalement plutôt terne malgré ses velléités provocatrices. Et puis je me sens gêné de m'acharner sur ce type : un de ses crobards sur dix, tout de même, m'arrache un pâle sourire, et quant aux autres, je ne les comprends pas toujours.
Je me détourne donc de la Grèce et aussitôt l'actualité me propose un sujet brûlant : le centenaire du génocide arm... pardon : des événements regrettables causés par les massacres que commirent des Arméniens sanguinaires sur d'angéliques populations turques. ?elle est, si j'ai bien compris, la position officielle d'Ankara, partagée par la majorité de la population, et s'il nous est pratiquement difficile d'andouiller des dizaines de millions de malheureux sous-éduqués, sous-informés, on pourrait récompenser le seul M. Merdogan, leur guide. Oui, mais le côté gentiment rigolard de notre cérémonial tranche trop douloureusement avec l'horreur de la tragédie en question, et puis l'on a scrupule à enfoncer un peu plus encore ces malheureux Turcs, devenus la risée d'une bonne partie de la planète, au point de passer pour ce qu'ils ne sont tout de même pas : un peuple cruel et sous-développé. D'autant qu'à bien y réfléchir, leur négation du gén... des malheureux incidents est naturelle. C'est un fait de civilisation, c'est dans leurs gènes, c'est ce qui fonde leur identité : le repentir et tout ça, c'est bon pour ces pédés d'Occidentaux ; en Orient, de la Russie à l'Arabie, là où les hommes sont encore des hommes, l'examen de conscience et le regret d'avoir tué n'ont pas cours. Au contraire, massacrer vous rend fier. Vos ancêtres sanglants sont d'immortels héros.
J'en suis là, toujours bredouille, lorsque Dailytube, là encore, me sauve la mise : la voilà, mon andouille !
«Que dirions-nous, nous Français, si un autre pays venait nous dire ce qu'il faut penser du massacre des Vendéens sous la Convention et nous menacer de sanctions si nous pensions autrement ?»
On ne fera pas au volkonaute l'injure d'expliquer pourquoi ce raisonnement prend l'eau par tous les bouts. Son auteur, Michel Diefenbacher, est français, il n'a donc pas de circonstances atténuantes, lui. Je l'ai connu jadis, j'ai suivi avec lui de nombreux cours d'histoire et de philosophie qui auraient dû exercer sa jugeote. Il est vrai que notre homme est président des Amitiés franco-turques, ce qui ne lui laisse pas en l'occurrence une extrême liberté de parole, et que devenu homme politique, UMP de surcroît, il a dû apprendre à dire comme ses pareils les pires inepties sans y croire — et finir par y croire, parfois, pour de bon.
Désolé, camarade, je n'ai personne d'autre sous la main, tu paieras pour les autres.
Désolé, certes oui, mais en même temps quel bonheur de retrouver ici, s'agissant des Turcs, le même argument tordu que tout à l'heure à propos des Grecs ! Quelle consolation de découvrir, sortant de ce bain de boue et de sang nationaliste, cette grande fraternité de la connerie, qui n'eut jamais et n'aura jamais de frontières !
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